FACE À LA DIABLERIE
Les exorcistes font enfin la rencontre du véritable démon qui faisait peser sa menace sur le village. Et ça va faire très mal ! Je passe ensuite à un nouveau jeu de rôle avec le vénéneux L’Empreinte.
Joué / écrit le 14/11/2019
Jeu principal utilisé : L’Empreinte, de Thomas Munier, survivre à une transformation qui nous submerge
N.B. : Les personnages et les faits sont fictifs.
Le projet : Dans le mufle des Vosges, un roman-feuilleton Millevaux
Précision : ces feuilletons sont des premiers jets, donc beaucoup de coquilles demeurent. Merci pour votre compréhension.
Avertissement : contenu sensible (voir détail après l’image)
Dan Noyes, cc-by-nc-nd, sur flickr
Contenu sensible : cruauté envers les animaux, suicide, mutilation
Passage précédent :
4. Purification
L’histoire :
Dwelling In A Dead Raven For The Glory Of Crucified Wolves, par Wolfmangler, du drone dark folk riche en cuivres et en chant sinistre, à la fois murmuré et grogné, pour une chasse funèbre entre chiens et loups.
Soeur Marie-des-Eaux encaisse mal le choc. Quand Soeur Jacqueline reprend ses esprits et revient au monde matériel, c’est pour voir le novice se noyer dans le ruisseau des Forges Quenot.
Elle s’empare de sa main grêle et tire de toutes ses forces. Un instant, ça ne semble pas être suffisant, mais le temps d’après le corps du novice suit tout seul. Champo avait dévalé le talus et avait tiré l’autre poignet. Le novice ne s’étale pas en remerciement, il s’empare aussitôt de sa robe pour la jeter sur sa nudité. Le sherpa n’a pas l’air intéressé par la chose, mais ça ne change rien à la pudeur de Soeur Marie-des-Eaux, qui n’a vraiment confiance qu’en Jacqueline. Un peu confiance.
Les voilà maintenant en haut du talus. Champo a allumé un feu et elles se réchauffent à proximité de la pierre maternaire. Craquements d’escarboucles qui procurent une fausse intimité, une fausse sensation de réconfort. En forêt, il faut toujours être aux aguets.
« Je pense que vous voulez retourner chez les Thiébaud. Je voudrais vous accompagner.
– Pour quelle raison ? Vous nous tenez sans doute responsable de la mort de Basile.
– Je ne raisonne pas en termes de cause à effet, de bien ou de mal. Certes, votre exorcisme lui a fait du mal, mais c’est trop tôt pour faire un lien avec son suicide. Et c’est trop tôt pour savoir si vous avez bien fait ou mal fait. Mais je pense une chose : il y a ici des forces néfastes, et les habitants des Voivres sont trop péteux pour prendre les choses en main. Vous êtes des étrangères et vous venez nous aider alors que tout le monde vous crie de vous mêler de vos oignons. Moi, je pense que vous êtes bien intentionnées et que c’est mon devoir de vous aider, pour protéger les gens de ce village, en priorité les enfants.
– On ne peut pas accepter, c’est un païen, siffla la Soeur Marie-des-Eaux.
– C’est surtout un homme de bien, coupa la Soeur Jacqueline. Qu’il soit baptisé ou non, c’est un don du ciel pour la mission que tu veux tant dont on s’acquitte. »
C’est donc à trois qu’ils remontèrent la grande-rue, en direction du Chaudron. Quand la Soeur Jacqueline vit la Bernadette sur le pas de la porte, son coeur se serra. Quelque chose se noua dans ses tripes, comme si ses chairs se calcinaient, comme si la merde lui remontait le long des intestins, ça faisait un mal de chien comme elle n’en avait jamais connu. Elle s’approcha de la Bernadette, et comme cette dernière ne la repoussait pas, elle se sentait étrangement mieux. L’odeur de graillon et de transpiration de la cuisinière était comme un baume pour le feu qui lui bouffait le bide.
« Alors vous remontez au Chaudron ?
– Oui.
– Soeur Jacqueline, je vous en prie, faites quelque chose pour moi.
– Tout… ce… que… vous voudrez…
– Ramenez-moi la corde du pendu. Elle ne doit pas tomber en de mauvaises mains.
– O… oui…
– Faites attention aussi au petit. Je comprends pas pourquoi il veut pas se faire soigner. Je comprends pas comment il arrive à tenir debout avec toutes ses fractures.
– C’est… C’est sa rage qui le maintient en vie.
– C’est ça, c’est un renard enragé. Prenez garde à sa morsure. »
La Bernadette lui prit sa main. La doyenne sentit le contact physique avec une acuité qui lui fit peur. Le fourmillement dans ses articulations, les ongles de la cuisinière enfoncés dans sa peau, le frottement de leurs deux épidermes. Puis la Soeur Marie-des-Eaux la tira de façon bourrue et la séparation fut douloureuse comme un déchirement musculaire.
Il régnait une pluie pisseuse qui détrempait les chemins et collait aux frusques, charriant une odeur de grès qui donnait presque la nausée.
Champo les fit passer par un chemin différent, pour brouiller les pistes. Au détour de la ferme des Fournier, avant les Faignottes, ils empruntèrent un chemin tout encombré de pierres semées avec anarchie dans l’humus. Ils passèrent à côté d’une maison en ruines, « le château de paille », d’après leur guide, d’où dégorgeaient des masses de foin moisi.
La Soeur Jacqueline jetait des regards nerveux derrière son épaule.
« On nous suit… On nous guette… »
Crâ !
Seul le cri d’un corbeau répondit à cette remarque. Il y avait un tel fouilis de broussailles et de branches noueuses, que les tréfonds de la forêt étaient difficile à discerner, malgré la chute des feuilles.
Leur éventuel espion bénéficiait de l’avantage du terrain.
Puis il y eut une côte à descendre, avec des ornières si profonde que les deux soeurs, percluses qu’elle étaient, n’arrivaient pas à avancer sans l’aide du sherpa qui tirait leur cordée comme à la manoeuvre.
Enfin un chemin à niveau mais tout aussi accidenté que les précédents, longeant un étang obstrué par les lentilles d’eau, un verger de pommiers retourné à l’état sauvage, et juste avant l’écurie des Thiébaud, un entrepôt passablement abandonné, dont le dernier usage semblait être pour le stockage des stères de bois en attente de la découpe, et qui était rendu à l’empire des buissons d’orties, des ronces, des poutres effondrées et des bâches déchirées.
Ils trouvèrent les Thiébaud dans leur cuisine. Dans un triste état. La nourriture était carbonisée dans la poêle sur la cuisinière à bois, le père soliloquait dans son fauteuil et la mère était au trente-sixième dessous, du vomi sur son tablier à fleurs, hagarde. Ils étaient tellement diminués qu’ils étaient à peine conscients du sort de leur fils.
« Bobi, si Félix est rentré ? »
La Soeur Marie-des-Eaux se mit en tête de chercher le chat, dans l’espoir que ça leur redonnerait un peu le moral.
Au pied du poulailler, la Soeur Jacqueline et Champo trouvèrent l’Elie, un chasseur du village. Il était là, le fusil cassé, en bottes de plastique et béret, avec son chien, et comme qui dirait il occupait tout l’espace avec se bedaine et ses yeux de faucon, un peu ici en terrain conquis comme le sont partout les chasseurs. Il portait un jeune chevreugne dans ses bras, avec une grande douceur, comme on porte un enfant. Un enfant avec trois impacts de balle au flanc, et le chargea dans la benne de son tracteur avec délicatesse, amoureusement pour ainsi dire.
La Soeur Jacqueline se dit qu’il avait de la veine que la Soeur Marie des Eaux soit en train de chercher le chat.
Il expliqua qu’il était sur la trace d’un gibier quand il est passé devant la ferme des Thiébaud, et s’est arrêté pour les saluer. Voyant leur état, il s’est dit qu’il irait voir le Basile, et c’est lui qui l’a découvert.
« Je l’ai décroché. Je pouvais pas le laisser comme ça. »
L’Elie est le seul équipé d’une CB dans le village, un outil à la fois pratique pour le chasseur et le cancanneur qu’il est. C’est ainsi qu’il a prévenu la mairie et que Champo a été mis au courant par proximité. Ensuite, il a repris sa chasse et là il s’apprêtait à rentrer. Champo l’aida à descendre Basile en bas du poulailler pour le mettre dans la benne contre le chevreugne. On aurait vraiment dit deux enfants, tous deux avec une tête paisible dans la mort.
« Félix ? Minou, minou ! »
La Soeur Marie-des-Eaux était monté sur le pont, c’est toujours là que ces cons de chats viennent se cacher.
Au premier étage, il y avait toujours ce relents d’oignons et de jus de pommes ranci mais pas de trace du matou.
Un bruit.
Le novice monta le raide escalier du deuxième avec précaution, il avait l’air aussi esquinté que ses propres abattis et craquait sous ses pieds pareil.
Cette fois, le mémographe qu’il était ne put s’empêcher de s’arrêter sur les cartons de revue. Un observateur extérieur aurait pu le voir feuilleter avec avidité les pages hors d’âge du journal La Liberté de l’Est. Les étranges événéments de l’âge d’or défilaient sous ses yeux, de l’encre qui sentait le moisi, des photos bleuâtres. Deux hommes chauves. Les irradiés de Forbach. Et des considérations sur le danger nucléaire. Voici ce qu’un observateur extérieur aurait pu voir.
La gorge de la Soeur Jacqueline se noua quant au terme d’une pénible escalade, elle arriva dans les combles du poulailler. Trois poules gloussaient sous la poutre principale. Le filet de lumière à travers la vitre de plastique éclairait le noeud coulant que l’Elie avait laissé sur le plancher. Il y avait ça et là tout ce qui restait du Basile : des cordes avec d’étonnants noeuds de marins, des baugeottes finement tressées, des bombonnes de jus de pomme à moitiée parées d’osier, et puis de ridicules jouets en ficelle.
Elle prit la corde de pendu dans ses mains, et songea à l’autre corde que le Basile leur avait offert, qui pendait à sa ceinture.
Elle sentit que quelque chose bougeait.
La Soeur Marie-des-Eaux cligna des yeux, et comprit au fourmillement dans son crâne qu’un temps indéterminé s’était écoulé à compulser des archives sans importance pour ceux qui les produisirent et cruciales pour les personnes d’aujourd’hui qui tombaient dessus.
Des particules de poussière volaient dans la lumière qui perçait du toit.
Il tourna la tête vers la pièce où était remisé le Jésus-Cuit, invisible car dans l’angle mort. Sur le plancher fragile de cette pièce, il y avait un petit corps roux inerte.
La Soeur Jacqueline secouait la poêle sur la cuisinière. Il fallait que la mère Thiébaud mange quelque chose, alors elle avait jeté quelques oignons et des patates dans cet ustensile qu’avaient cuirassé les fossiles noirs d’années et d’années d’huile brûlé.
L’Elie faisait la conversation au Père Thiébaud mais c’était pas évident.
« Bobi, si les Etienne sont rentrés des affouages au Beaulieu ?
– C’est pas bon, ça… Il parle de chantiers agricoles qui datent d’il y a trente ans. Les deux-là, on dirait qu’ils était complètement sucés. »
Difficile de savoir si le plus effrayant était que le Père Thiébaud soit retombé dans le passé ou si c’était que l’Elie soit capable en toute conscience de dater des choses aussi anciennes.
ça commençait à sentir bon les oignons et les patate, et ça faisait un peu oublier la misère généralisée.
The Dynamic Gallery of Thoughts, par …and Oceans, du black metal orné de claviers de toutes parts, maléfique, mélodique et racé.
Le novice s’avança pour se pencher sur le chat. Le plancher grinça.
Félix était mort. Il était tout sec, comme momifié. Comme sucé.
La Soeur Marie-des-Eaux sentit une force qui lui chopa le cerveau à pleine mains et commença à presser.
Cela aurait pu sonner n’importe qui d’autre, mais cette attaque sournoise et violente activa son mode guerre.
Le novice vit aussitôt volte-face, l’Opinel lancé en arc-de-ciel comme une prolongation naturelle de son bras. Son poing vient se briser à moitié sur la surface de son assaillant.
La statue de Jésus-Cuit !
Tous dans la cuisine entendirent des bruits de lutte monumentaux et se précipitèrent dans le salon en croyant que ça venait de là.
C’est ainsi qu’ils virent le plafond s’effondrer sous le poids de la statue et du novice. Sous la secousse, l’horloge comptoise du salon perdit l’équilibre et s’éclata sur le dos de la Soeur Marie-des-Eaux. La statue était explosée en trois morceaux et – une foutue – CHOSE – en émergeait, comme un amas de ronces d’où pendaient des grappes d’humeurs visqueuses et des ocelles qui luisaient d’un éclat noir. La chose s’aggrippait au corps du novice par ses crampons, labourant sa robe et ses chairs. Le novice chercha à frapper son ganglion central, une masse de métastases orné d’un sphuncter suceur, mais les ronces lui bloquèrent le poignet en en faisant gicler le sang dans une scène christique. Une ronce-sphuncter se jeta au visage du novice – « Non, non, NOOON ! » – et lui rentra dans l’oeil, directement, traversant l’orbite comme une pointe dans une planche. Et maintenant, elle n’avait plus qu’à aspirer sa cervelle. Plus rapide qu’une absorption télépathique.
Spprr—lotch !
C’est en résumé le bruit hideux que produisit la chose quand la Soeur Jacqueline écrasa la poêle chaude sur son ganglion central.
C’en était fini du véritable démon qui hantait Les Voivres.
L’écurie de l’Auberge du Pont des Fées était calme. Les chevaux respiraient avec silence. La chaleur et l’odeur du crottin formait comme un cocon. La Soeur Jacqueline soignait l’oeil de son novice du mieux qu’elle pouvait. Celui-ci n’avait pas eu la force de refuser qu’on se replie à l’auberge, mais refusait encore que la Bernadette s’occupe de lui. Il brossait le dos de Maurice et lui donnait de l’avoine par petites poignées que l’âne avalait goulument, avec une tranquille approbation. Cela apaisait le novice et occultait un peu l’immense douleur qui le crevait de toutes parts.
Après l’attaque de la chose dans la statue, ni le maire ni le prêtre n’avaient eu à coeur de maintenir l’exil des deux nonnes. Tout juste si le père Houillon avait rappelé qu’il y aurait séance de confessionnal dès qu’elles seraient un peu sur pied.
Le mal qui tirait le ventre de la Soeur Jacqueline s’était un peu adouci depuis qu’elles étaient revenues à l’Auberge, mais elle ressentit le besoin de laisser là le novice et trottiner jusqu’aux cuisines sous prétexte d’aider. Dès qu’elle vit la Bernadette affairée aux fourneaux, penchée sur ses gamelles le front humecté de sueur et les lunettes embuées, elle sentit que ça la bouffait moins.
« Vous prendrez bien du saucisson tant que la Soeur Marie-des-Eaux n’est pas là pour faire la police. »
La Soeur Jacqueline hocha la tête. La cuisinière lui tendit une rondelle rouge presqu’à portée de sa bouche. La doyenne s’en empara, c’était graisseux au toucher et chaud et acide sous la langue.
« Je ne comprends pas ce que votre novice a contre la charcuterie. C’est tout le terroir des Vosges.
– Elle aime les créatures du Vieux plus encore que les hommes, je crois.
– En attendant, faudrait bien qu’elle prenne des forces. Parce qu’elle vous expose à un grand danger, sachez-le. Et ça m’inquiète parce que je tiens à vous. »
Ces derniers mots eurent plus d’impact que la Soeur Jacqueline ne l’aurait imaginé. Elle se sentait fondre comme si elle était elle-même une rondelle graisseuse de saucisson dans une bouche gourmande. Elle essaya de passer un coup de balai dans ces pensées.
What has become of the one i love ?, par Yseulde, du post-americana lunaire et lo-fi pour un feu de camp introspectif à l’infini.
« Ce que vous avez vu… au Chaudron. C’était un horla. Il se nourrissait de l’énergie mentale des gens qui allaient à la messe.
– Un horla ?
– Bien entendu, vous n’avez jamais entendu parler de ce terme. Ils vous ont pas bien préparé vos curés exorcistes, au Diocèse. Ils vous ont tout expliqué de travers, avec leurs histoires de diable. »
Elle tira un tiroir pour montrer le noeud coulant qui y était caché au milieu des couteaux de cuisine.
« Encore merci pour ça. J’en ferai bon usage.
– Bon usage ?
– Ecoutez, Soeur Jacqueline, je vous suis reconnaissante pour ce que vous avez fait pour le village et je veux vous aider. J’ai appris dans le Petit Albert deux ou trois choses qui pourraient vous être utiles. Vous voudrez bien de mon aide ?
– Naturellement.
– Tant mieux, parce que si vous continuez à taper dans les taupinières, vous pourriez bien trouver d’autres horlas. Maintenant, je vais vous montrer comment cuisiner des rognons. »
La chair de foie de veau rissolait dans la poêle, emplissant les narines de son fumet. La main ridée de la Bernadette tenait le poignet de la Soeur Jacqueline pour la guider, doucement mais fermement.
La voix de la Soeur Marie-des-Eaux égrénait les faits de la journée et de la veille. Il avait besoin de dire à haute voix ce qu’il inscrivait dans son carnet mémographique maintenant qu’il était borgne.
ça raisonnait dans la tête de la Soeur Jacqueline allongée, en proie à la brûlure qui lui tenaillait le ventre et descendait, et bien consciente que ça n’aurait pas été convenable d’aller visiter la cuisinière à cette heure-ci pour se calmer.
La voix du novice énumérait le récit de leur calvaire d’une façon monocorde qui dénaturait ce qu’elles avaient vraiment vécu, et renforçait la conviction que la Soeur Jacqueline avait sur la vacuité du dogme mémographique.
Puis ce fut, alors que la bougie s’étouffait dans sa fumée, l’habituelle litanie des prières d’exorcisme et de l’Apocalypse :
« Et ceci sera l’œuvre du Démon. Car le Démon est entré dans la demeure de l’Homme quand celui-ci lui a ouvert la porte et l’a accueilli à bras ouverts. Il a laissé le Démon marcher dans les rues et les palais de Babylone et il lui a servi du vin et l’a appelé Fils de l’Homme.
Et le Démon lui a donné ce qu’il nommait des bienfaits : la vie, la fertilité, l’abondance, et toutes les bêtes et les choses à son service.
Et l’Homme s’est bandé les yeux, il a goûté au fruit tendu par le Démon et il a mordu sa chair grouillante d’asticots sans prendre garde à son goût infect. Et l’Homme a sacrifié les êtres et les choses innocentes au Nom du Démon, il a embrassé la bouche du Démon, et il a dit : « J’embrasse la bouche du Fils de l’Homme. »
La Soeur Jacqueline murmurait en écho pour faire acte de participation, mais sans conviction. Et la voix de son infortuné novice s’éteint dans un souffle comme la flamme de sa bougie, pour sombrer dans un sommeil où la fatigue extrême, l’exténuation terminale du corps, avait pour un temps triomphé sur la souffrance.
Mais pour la Soeur Jacqueline, la nuit s’étirait comme une rivière polluée, dans la rumeur des chats-huants, le roulis des feuilles mortes et la brûlure qui la tiraillait encore plus dans l’inaction. Elle descendit le main le long de son ventre et se massa les bourrelets dans l’espoir que ça se calme.
Lexique :
péteux : peureux
pont : grenier
baugeotte : gros panier à anse double
Bilan :
Un long préambule joué sans jeu de rôle attitré, puisque rédiger la fin de l’arc du Jésus-Cuit m’a pris les deux premières heures, sans suport des Exorcistes, et avant de créer mes feuilles de personnage avec L’Empreinte, réservée au nouvel arc consacré aux Soubise. Avec cette création, j’entérine le fait que Champo fait directement partie de l’équipe. Je flippe un peu parce que je pense que mes personnages vont en baver, avec d’importants risques de mort, mais je m’attends à ce que la nouvelle menace soit vraiment balèse et donc je dois pas les surprotéger. Allez, comme on n’est quand même qu’au début du roman, je règle la difficulté du jeu en mode intermédiaire. Je me dis que Champo servira de fusible, mais sait-on jamais, ce n’est peut-être pas lui qui va y passer, et quelque part ça m’arrangerait, j’aimerais bien faire une session d’Oriente centrée sur lui.
Bon allez, je change d’avis. Je passe en mode cauchemar pour montrer ce que L’Empreinte a dans le ventre et pour sortir de ma zone de confort. En revanche, je vais rester à un jet de dé par acte.
J’ai en revanche utilisé Oriente et Muses et Oracle, un tirage de chaque, pour raconter le voyage au début de l’épisode. J’ai passé beaucoup de cartes Oriente avant de trouver mon bonheur avec la carte « Quelle bête vous suit partout ? », qui fait le lien avec le fait que les Soubise ont mis les soeurs en filature. Je tire une carte Muses et Oracles et là, parfait, je tombe sur une icône de corbeau. Y a-t-il un lien entre les Corax et les Soubise ou la Mère Truie ? La suite nous le dira !
J’ai encore une fois utilisé des anecdotes très personnelles mais je me garderai bien de vous dire lesquelles.
Notes liées aux règles de l’Empreinte :
Menace : une Déité Horla (la Mère Truie)
Lieu de départ : Les Voivres
Avancement :
Acte I – Introspection + Tentation
Feuilles de personnage
Champo (créé avec L’Empreinte)
Vocation : Vagabondage
Métier : guide
Attitudes : Combattre la menace / Fuir la menace
Soeur Jacqueline
Feuille créée avec L’Empreinte :
Vocation : Sorcellerie
Métier : Nonne exorciste
Attitudes : Ressentir de la fascination pour la menace / Agir selon ses propres objectifs dans l’ignorance de la menace
Feuille créée avec Les Exorcistes :
Vice :
+ La luxure
Vertu :
+ La prudence
Description physique et personnalité :
Cinquantaine, visage rond et couperosé par la bière de lichen, yeux un peu fixes. Bonne vivante. Assez affectée par l’oubli, n’a pas de souvenir d’avoir jamais quitté le couvent de Saint-Dié
Bref historique :
Il est possible qu’elle ait eu récemment une vie en dehors du couvent. Il est aussi possible qu’elle ait été cloîtrée pour contrer son penchant à la luxure, et qu’on l’ait incité à oublier son passé (onction à l’eau bénite d’oubli ?)
Mots-clefs :
– Soeur Exorciste
– Inspire la confiance
– Cuisinière
– Contemplative
– Intuitions
Lien avec autre PJ :
A sauvé la vie de Soeur Marie des Eaux mais ne s’en souvient pas. Aurait été sa formatrice ou sa compagne d’apprentissage en exorcisme ?
PNJ Favori :
Bernadette, la tenancière du Pont des Fées
Passé oublié (tiré avec Session Zéro) :
Personne n’est parfait. Quel est le plus gros mensonge que vous ayez jamais énoncé ? À qui
l’avez-vous révélé ? Pourquoi avoir menti ?
J’étais la servante d’une Mère Truie. Je l’ai révélé (sous la torture) à l’archevêque de Saint-Dié. J’ai menti parce que j’étais infiltrée chez les chanoinesses, mais l’archevêque m’a sauvée de l’emprise de la Mère Truie et m’a accordé l’eau d’oubli.
Les anniversaires sont toujours prétextes à de grandes fêtes. Décrivez votre anniversaire le
plus mémorable. De quel anniversaire s’agissait-il ? Qu’est-ce qui l’a rendu si mémorable ?
C’est l’anniversaire de mon entrée au couvent. Il est mémorable parce que j’ai vraiment le droit de manger beaucoup à ce moment et parce que personne n’évoque jamais la date exacte de mon entrée.
Un amour passé fait toujours partie de votre vie. Depuis quand étiez-vous amoureuse ?
Qu’aimiez-vous le plus chez cette personne ? Comment votre histoire s’est-elle terminée ?
J’ai été amoureuse d’une batelière qui menait les pélérinages vers la fontaine d’oubli. J’aimais la langueur de cette personne. L’histoire s’est terminée quand j’ai dû boire l’eau d’oubli.
Soeur Marie-des-Eaux
Feuille créée avec L’Empreinte :
Vocation : Combat
Métier : Nonne exorciste
Attitudes :
Combattre la menace / Se rapprocher par erreur de la menace
Feuille créée avec Les Exorcistes :
Vice :
La colère
Vertu :
La force
Description physique et personnalité :
Jeune, borgne (cache-oeil), cheveux courts, visage androgyne (tout le monde la genre au masculin). Un air de froide détermination. Paranoïaque et violente. A reçu une formation de mémographe et tient un registre de tous ses souvenirs (pattes de mouche)
Bref historique :
A connu une jeunesse très traumatique (elle a notamment aimé un horla, mais celui-ci est mort quand ils se sont embrassés, étonnement c’est la chose qui l’a marqué le plus alors qu’elle a été victime de choses plus violentes), au terme duquel elle a d’abord reçu une formation de mémographe puis de soeur exorciste. En guerre contre les figures du mal. Assez attachée au voeu de chasteté. Fascinée par le texte de l’Apocalypse.
Mots-Clefs :
– Soeur Exorciste
– Opinel
– Mémographe
– Combattante
– Âne
Lien avec autre PJ :
A sauvé la vie de Soeur Jacqueline, s’en rappelle mais ne veut pas lui remettre ça dans les dents. La naïveté de Soeur Jacqueline a failli leur coûter la vie en enfer.
PNJ favori :
Basile, le cordelier (ses cordes sont vecteurs d’égrégore, elles lui ont révélé la statue de Jésus)
Passé oublié (tiré avec Session Zéro) :
Il y a quelqu’un de spécial à qui vous avez ouvert votre cœur. Décrivez votre premier amour :
Était-ce réciproque ? Qu’est-ce que vous aimiez le plus chez cette personne ?
Je pense que c’était réciproque. C’était un être de cicatrices et de souffrance, alors il me comprenait sans parler, c’est ça que j’aimais le plus chez lui. Notre amour était réciproque et c’est ça qui l’a perdu, il est tombé en miettes quand je l’ai embrassé.
Un son particulier vous fait toujours sourire. De quel son s’agit-il ? Comment est-ce devenu
un son rassurant pour vous ? L’entendez-vous encore maintenant que vous avez commencé à
voyager ?
C’est le son de l’eau courante. Cela évoque la vie et la pureté qui continuent à se trouver un chemin, malgré tout. Je ne l’ai pas beaucoup entendu durant mon périple, aussi je m’intéresse à découvrir où sont les ruisseaux aux Voivres, on m’a parlé des Forges Quenot.
Vous aviez un compagnon fidèle en grandissant. Décrivez l’animal qui a accompagné votre
enfance. Comment est-il devenu votre compagnon ? Est-il toujours votre animal ?
C’était un lapin dodu et je l’emmenais partout avec moi. Mais un jour, on m’a fait manger du civet et j’ai appris que c’était mon lapin. C’est le dernier souvenir que j’ai de mes parents.
La suite :
6. Le Vieux nous voit
Emportées par la folie ambiante au sein du village et par leurs vieux démons mémoriels, les deux nonnes exorcistes partent en quenouille.
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