Le non-dit, le non-jeu et le non-joué

Jamais à court d’effets de manches, il remplit 28 minutes de contenu en parlant du fait… de ne pas jouer son personnage.

(temps de visionnage : 28 min) / (temps de lecture : 6 min)

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[Publication]  Les Sylvonautes

Incarnez des âmes perdues dans les méandres de la forêt de Millevaux ! Ceci est un jeu de rôle belonging outside belonging, autrement dit un hack du jeu Dream Askew, d’Avery Alder.

Que vous vous dévouiez autant à la guerre qu’à la guérison, que vous apparteniez à un ordre de chevalerie maudit, que vous incarniez l’innocence ou pratiquiez la sorcellerie, que vous portiez des flingues ou posiez du son ou que votre vie se résume à l’art total, il y a forcément un livret de personnage pour vous  !


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Le petit bonhomme en plâtre est une photo de Thomas Hawk, cc-by-nc
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Le script de la vidéo

Aujourd’hui, juste pour faire un épisode de plus, on va parler… du rien en jdr.

Blague à part, ça me semblait intéressant de traiter ce qui semble un non‑sujet et d’en tirer quelque chose d’intéressant.
Ici, on va se concentrer sur le point de vue des jouaires et découper le rien, le non‑geste en trois catégories : Le non‑dit, Le non‑jeu et Le non‑joué, pour te montrer comment en fait ça enrichit le jeu.

Le non-dit

D’abord, ce que le perso ne dit pas mais qui peut être sous-entendu par une description ou par un discours méta ou la verbalisation de ses pensées, et ça marque une pudeur, un secret (cf la vidéo pour Comment garder un secret), une incompréhension, une hésitation, une résistance intérieure. Bien sûr, ça a aussi un intérêt même sans discours de transparence qui viendrait expliquer ce non‑dit, puisqu’il y a toujours du jeu intérieur (cf vidéo sur le sujet) qui vient contredire l’affirmation de Grant Howitt « ça n’existe pas si tu n’en parles pas ».

Le non‑dit ça me fait aussi penser aux personnages muets, ce qui est souvent vécu comme la plus grande difficulté en jeu de rôle comme en GN. Or, un personnage muet peut être expressif et compréhensible si par ailleurs on utilise le non‑verbal, la gestuelle, les textes, descriptions, le discours méta, ou si un accompagnement est présent (PNJ traductaires en LSF, magie télépathique, voire tout le monde parle la LSF dans l’univers).

Ces deux exemples généraux et particuliers sur le non‑dit illustrent que le bon jeu ne passe pas forcément par la clarté et la compréhension mutuelle, mais que du jeu ressort aussi du secret, du quiproquo ou simplement de la danse empathique (i.e. le parcours d’embûches pour se comprendre, se rejoindre, accoucher la confidence de l’autre), que cela se passe sous forme de jeu à secret, en convergence, ou en transparence.

Le non-jeu

Le non‑jeu est peut-être une forme plus négative de vacance, ou en tout cas c’est mal vu. Ce peut être la sentorette, qu’il s’agisse d’une personne timide (cf ma vidéo sur les timides) ou kiffant être dans une posture de public, elle peut se situer dans une zone de hors‑jeu, le banc de touche d’où on peut être actif sous forme de commentaires verbaux ou non‑verbaux, ce peut être la personne qui fuit l’aventure (refus de se prêter au jeu, refus du play to risk) (cf vidéo Kakou la d6D sur la chaîne de Lestat), ce peut être les phases de jeu qui piétinent (shopping, enquête) même si à nouveau on peut le voir sous forme positive (RP dînette – il y aura une vidéo sur le sujet –, simulation de l’ennui, temps calme (cf quelques techniques pour utiliser et créer des moments de faible intensité en jeu), cf vidéo sur le jdr sans conflit, cf le GN merde mon train)

Peut-on faire Le désert des tartares en jdr ? Ou Bartleby ? Peut-être avec le jeu Le Témoignage

L’approche la plus mainstream me semble être l’ennui à Vampire La Mascarade

Le non‑jeu c’est aussi les moments de convivialité (jdr et hospitalité), les mécaniques qui prennent du temps et jouent à notre place (cf notion d’interstices et mécaniques) ou au contraire quand on ne sollicite pas les mécaniques (freeform sauvage). C’est aussi, notamment en GN, le refus de jeu comme mécanique d’auto‑défense et de sécurité émotionnelle : on peut le signaler par le signe gestuel « j’ai la tête sous l’eau ». Il y a aussi le droit de retrait / politique de la porte ouverte, c’est enfin prendre le temps, faire des pauses, utiliser la carte pipi, faire des débriefings intermédiaires. C’est aussi tout le temps hors‑jeu : débriefings, infodump, digressions, blagues méta, hors‑jeu, bouffes, small talk, etc., qu’on peut voir comme une perte de temps ou comme une composante essentielle de la convivialité (cf article « Le jeu de rôle n’est pas un jeu« ).

C’est aussi l’absence (table ouverte), c’est enfin l’anti-jeu, quand unn jouaire ne joue pas le jeu, quand MJ casse les règles du jeu, transforme le jeu en histoire dirigisme, bien que ce soit embrassé positivement dans la recherche du non‑protagonisme (vidéo à venir sur le sujet) ou du fateplay.

J’ai récemment testé mon scénario romanesque Ce que chaque main tait à l’autre et il y a le personnage de Jonquille qui est un rôle central (Jonquille est à l’agonie et tout le monde veut la soigner) mais qui ne fait rien (car elle est persuadée de guérir) et est surtout dans la réaction, dans jouer l’impact, à commenter les situations la concernant alors que son perso est absent : ce sont des configurations contre lesquelles on peut lutter (par exemple Inflorenza où la capacité d’agir des personnages est maximisée) ou on peut les considérer comme désirables (cf ma vidéo sur les jouaires timides).

Le non-joué

Le non‑joué, c’est en gros les actions qui ne seront pas interprétées : soit parce que les mécaniques les prennent en charge (cf ma vidéo « Faut-il rouler les dés pour du social ?« ), soit parce que c’est ellipisé (cf article La description contre l’ellipse) ou hors‑champ (passé ou avenir du personnage), ce sont aussi les actions que le personnage envisage mais abandonne soit parce qu’une tierce partie l’en dissuade (conflit social), soit parce que le personnage y renonce de lui-même (conflit intérieur, aversion du risque), soit parce qu’il ne l’envisage même pas (échec au jet d’idée). Il y a une ironie dramatique hyper importante dans ce qui fait l’intérêt du non‑joué : la table sait que ça aurait pu être mais que ça n’a pas eu lieu.

On peut cependant se projeter de façon plus ou moins profonde dans le non‑joué : projection mentale, rêves, vertige logique ou en explorer plusieurs futurs parallèles avant de faire son choix.

On peut encore pousser la formule du non‑joué à son paroxysme avec des jeux comme La Grive Noire qui sont des jeux… sans personnage.

Bref, l’absence de jeu est en fait très fertile, que ce soit pour le jeu intérieur ou pour toute la tablée, et bien sûr cela nous instruit davantage s’il en était besoin sur la polysémie du terme « jeu » en général et dans le jdr en particulier.

6 commentaires sur “Le non-dit, le non-jeu et le non-joué

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