Ou plutôt, ça c’est que dit le podcast des trois Trolls. D’où cette vidéo réact où je réfute point par point les attaques faites contre le jeu de rôle homebrew ou amateur.
(temps de visionnage : 48 min) / (temps de lecture : 7 min)
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LIENS UTILES :
Notions
- jeu de rôle maison
- atomistique
- flow design
- MJ-jeu
- lore
- jeu amateur
- jeu indépendant
- fétichisme de l’objet
- jeu forgien
- jeu transformatif
- jeu d’imagination / jeu du théâtre de l’esprit / jeu d’immersion
- fanfiction
- Festival du film de Sundance
- éducation populaire
- otium
Multimédia / série sur la critique de jeux et de scènes
- Thomas Munier, Pourquoi Donjons et Dragons n’est pas un jeu de rôle (comme les autres), sur Outsider
- Thomas Munier, Faut-il jeter l’Appel de Cthulhu avec l’eau du bain ?, sur Outsider
- Thomas Munier, Le Free Kriegsspiel Revolution, sur Outsider
- Thomas Munier, Le bac à sable du quotidien, sur Outsider
- Thomas Munier, A court de sujet, je te parle des points d’expérience, sur Outsider
Multimédia / autres
Vidéos
- 3TROLL#19-Les JDR maison
- Thomas Munier, Comment créer un jeu de rôle
- In Defense of Bad Art (and a rant about AI), par Good Gloom
- Episode 0 – De La Politique Dans Mon JDR, par Otium Podcast
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Articles
- Thomas Munier, Le jeu de rôle : un jeu, un art, une expérience, sur Outsider
- Ben Parkinson, Teaching Changemakers Using Kingmaker, sur le site de l’éditeur Paizo
- Top Lifetime Grosses, Box Office Mojo, by IMDbPro
- List of best-selling books, sur Wikipedia
- Top Titles, sur DriveThru RPG
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Le petit bonhomme en plâtre est une photo de Thomas Hawk, cc-by-nc
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Le script de la vidéo :
Je vais me livrer à un exercice que je fais très rarement, en l’occurrence le React, mais voilà le podcast des trois Trolls, avec Gogots, Globo, et Romaric Briand a fait une émission sur le jeu de rôle maison et j’estime que les propos très critiques que Romaric Briand tient sur le jeu de rôle maison sont à l’opposé absolu de ce que je pense sur le sujet. Gogots et Globo lui apportent une contradiction mais à mon sens peu argumentée et donc je m’intercale dans mon programme sur les critiques de jeux et de scènes de jeu cette vidéo sur le jeu de rôle maison. Par ailleurs, c’est un sujet qui méritait que je traite donc c’est aussi l’occasion.
Mon but n’est pas d’antagoniser Romaric dont je respecte par ailleurs le travail.
Par ailleurs, je ne peux être sûr de sa sincérité dans ses arguments, car à plusieurs reprises il évoque le fait qu’il exagère exprès le trait.
Également il est possible que j’aie mal compris ses propos ou que ma mémoire me fasse défaut.
Bref, je vais essentiellement réagir aux arguments ou plutôt à ce que j’ai compris ou mémorisé. Je vais cependant, par facilité, dire “Romaric pense que” mais ce n’est pas une attaque contre la personne, mais bien une réfutation d’idées sur le jeu de rôle maison qui me permettent avant tout d’avancer ma vision des choses sur le sujet.
Mes définitions du jdr maison : inachevé, non-transmissible ou non écrit (MJ-jeu) / naïf-sauvage / non-professionnel / gratuit / non diffusé / éventuellement dans des licences connues ou dans des univers perso / pirate (contient du matériel copyrighté) / en perpétuel changement, y compris durant les parties (flow design) / adapté à sa table / obsessionnel et massif / l’œuvre d’une seule personne / parler des scénarios maison, des règles maison / frontière avec le jeu amateur & jeu indépendant
Je ne vais pas revenir sur la façon de créer un jeu de rôle maison, je vous renvoie à ma vidéo sur la création de jeu. Place au contre-argumentaire sur les défauts du jeu de rôle maison.
Merci aux participants du discord C’est pas du JDR, notamment Erwik, Fabien C, Dithral, DeReel, Matthieu B., avec qui j’ai échangé, ce qui m’a permis de construire un argumentaire.
Dans le podcast, Romaric avoue son espoir que le jeu de rôle changerait le monde en bien, notamment sur le plan politique et écologique, parce que ça nous incite à nous rassembler et à expérimenter des problématiques et donc potentiellement à nous éveiller et nous sensibiliser (exemple avec le jeu Dog eat Dog qui nous fait expérimenter la colonisation).
Par conséquent son désir c’est que de plus en plus de monde joue au jeu de rôle et pour cela à ses yeux il faut que le jeu de rôle s’industrialise, qu’il y ait beaucoup plus de jeux de rôles commercialisés.
Pour lui le jdr maison va à l’encontre de cette dynamique car 1 – il freine le développement de jdr commerciaux 2 – il freine le développement de la pratique du jdr, qui resterait dans un entre-soi 3 – les jdr maisons seraient de piètre qualité autant ludique que politique alors que les jdr commerciaux (comprendre surtout les jdr indépendants forgiens politisés) sont beaucoup plus aboutis et émancipateurs.
Y’a un autre point qui me choque dans son argumentaire c’est qu’un jdr maison n’a de valeur que comme prémisse d’un futur jdr publié. Cette injonction à la publication me semble délétère.
Également l’obstination à qualifier le jdr de média, alors que c’est aussi un art, un jeu, un loisir. et le fait de survaloriser le jeu social et le jeu moral, le jeu esthétique et le jeu tactique étant vus comme des dévoiements, des formes de jdr dépolitisées qui font du mal au jdr.
Sur l’industrialisation : on peut la voir comme une production rationalisée, faite pour plaire au plus grand nombre, donc dépolitisée. Peut-être que Romaric espère que la massification de la production de JDR permette à des JDR bouleversants de trouver leur public. ce qu’on pourrait d’ailleurs prouver avec des jeux comme Alice is Missing ou Pour la Reine qui à mes yeux profitent de l’industrialisation. Mais on peut se demander, si les jeux bouleversants d’un point de vue émotionnel ont leur place dans une industrie culturelle, ce qu’il en est des jeux politiques. On peut aussi s’interroger sur la simple pertinence que le jdr puisse changer le monde par rapport à des actions plus concrètes. J’ai le sentiment que le jeu de rôle (politique) est du registre de l’otium (cf la chaîne youtube du même nom), et non de l’action. Un démarreur, pas un résultat.
Si je voulais sauver le soldat Romaric sur l’industrialisation, on pourrait dire que des blockbusters d’auteur peuvent tirer leur épingle du jeu. ça s’est vu dans le cinéma hollywoodien avec des films à message qui se cachent sous le prétexte du fun (Fight Club, Matrix, V pour Vendetta), et même des films à message qui avancent frontalement (La Liste de Schindler, etc.).
De même qu’on peut supposer que les films indépendants de Festival du film de Sundance ne peuvent exister que parce que Hollywood garantit une santé du système.
Je suis allé voir les 200 films les plus rentables de l’histoire du cinéma. Aucun réel film à message dans le lot ! Sauf si pour toi Titanic, les Pixar et les films du MCU sont des œuvres à message – non, je le pense premier degré : y’a aucune œuvre engagée dans le top 200. Peut-être Forrest Gump ou Hunger Games à la grande rigueur et assez bas dans le classement.
Un petit peu plus d’œuvres engagées dans les 100 romans les plus vendus de tous les temps.
De même n’espérez rien de très politisé dans le top des ventes de DriveThru RPG.
Concrètement, encourager le jeu de rôle industriel en espérant que cela permette la mise en avant d’œuvres engagées, c’est un peu engraisser un âne en espérant qu’il ponde des crottes en or.
Et sacrifier le jdr maison pour sauver l’industrialisation pour sauver le caractère émancipateur du jdr, c’est non ! Déjà le jdr maison ne met aucunement en danger le jdr industriel et le jdr maison a ce côté contre-culturel et éducation populaire qui me semble absolument compatible avec les attentes qu’on se ferait d’un jdr émancipateur et de gauche.
Par ailleurs espérer qu’un Dog eat Dog fasse des milliers de ventes à condition que pour cela D&D/Hasbro fasse des millions de ventes, ça me semble en effet d’une grande tristesse, et pas du tout sûr que ça puisse marcher. Éventuellement des jdr politisés qui avancent sous le masque du fun, type Dogs in the Vineyard, mais certainement pas un truc aussi frontal que Dog Eat Dog. Un des rares jeux de rôle frontalement militants que je connaisse, c’est par exemple L’Insurrection et ça n’a rien d’un blockbuster.
Il y a encore l’argument “le jdr maison c’est pourri” qui me choque. Cette injonction à la qualité.
Je citerai en réaction une vidéo telle que In Defense of Bad Art (and a rant about AI), par Good Gloom. L’acte de créer, même si le résultat est imparfait, est présenté comme une forme de résistance et une manière de se reconnecter avec son soi véritable, au-delà de la seule valeur marchande.
Y’a aussi une dimension que tout jdr publié fut-il de gauche ne peut atteindre, c’est la personnalisation : en jdr maison, je peux crafter une expérience spécialement dédiée à une personne ou un groupe de personne (flow design), ce qui dessine une politique de l’intime qui échappe au jdr commercialisé.
Enfin je connais des personnes qui font des jdr maison ultra quali et bouleversants qui ne seront jamais publiés.
Par ailleurs, valoriser un média comme plus émancipateur qu’un autre c’est se tromper de focale. Ce sont les formes et les initiatives émancipatrices (et bien souvent marginales) à l’intérieur de chaque média qui comptent.
On peut surtout déplorer que les gens manquent de temps libre pour les loisirs et la culture. Qu’elle passe par un film politisé ou non, un jeu de 7 familles, D&D ou le dernier jdr maison ramené de l’école, peu importe. C’est l’otium qui est un enjeu.
Sinon il y aura toujours grosso modo les mêmes personnes qui profiteront d’un essor improbable des techniques de ventes et de médiatisation du JDR, du théâtre ou autre.
Mais pour le coup, si on veut discuter de privilèges, le jdr maison est un meilleur candidat que les jeux commercialisés, puisque grosso modo gratuit. Il est aussi accessible à des plus jeunes qui n’ont pas forcément de pouvoir d’achat ou d’accès facilité aux jdr (jdr de cour de récré avec ou sans dé mais grosso modo joué dans le théâtre de l’esprit ou en grandeur nature).
C’est d’ailleurs un peu le reproche que j’avais à faire dans les diverses initiatives de proposition de jdr à des populations africaines (pas toujours, mais parfois très défavorisées) où on leur offre quelques jeux français ou américains alors que ça me semblait plus pertinent d’échanger avec eux sur ce qu’est le jeu d’imagination et qu’ils développent leurs propres jeux d’imagination correspondant à leurs contraintes et plus facilement duplicables.
Je sais pas pourquoi je me suis embarqué dans la notion d’otium, je dis probablement plein de bêtises à ce sujet, mais bon j’espère que mes propos restent pertinents par ailleurs °:)
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