Être créatif, ce n’est pas uniquement rêver tout éveillé, c’est mettre de l’ordre dans sa vie pour créer.
Nous avons vu combien la création pouvait être intimidante. Nous avons vu comment lâcher prise d’un objectif de qualité ou de quantité. Nous avons vu qu’il suffisait de faire le premier pas, de se concentrer sur l’acte de création et non sur l’achèvement.
Pour autant, et même si la créativité est source de plaisir et d’épanouissement, elle implique de se retrousser les manches, de trouver de l’énergie. Cela se fait en mettant de l’ordre dans sa vie.
« Le hasard ne favorise que les esprits préparés », disait Louis Pasteur. N’attendons pas que l’inspiration nous tombe toute cuite dans le bec. Cultivons un regard créatif, un regard propice à transformer nos expériences en œuvres. Tenons une liste des livres que nous voulons lire, des voyages que nous souhaitons faire, des personnes que nous souhaitons rencontrer, bref créons un agenda d’expériences qui viendront nourrir notre créativité, et entraînons notre esprit à la serendipité, à faire des associations d’idées à chaque expérience, à avoir une vision globale, à chercher du sens dans ce que nous vivons, et des corrélations entre nos différentes expériences.
La créativité, c’est l’art de l’attention. « Regarde attentivement car ce que tu vas voir n’est plus ce que tu viens de voir. », disait Léonard de Vinci. La créativité, c’est appréhender les expériences dans leur mouvement, dans l’articulation de chaque instant avec l’autre. Qu’on soit artisan, chercheur, artiste, parent au foyer, c’est le même principe.
Sachons cultiver un état de haute énergie. Et pour cela, il n’y a pas de mystère. A long terme, la seule chose qui fonctionne, c’est de mener une vie saine. Changeons notre régime alimentaire par petites touches jusqu’à manger sainement : nous savons tous où nous pouvons nous améliorer dans ce domaine. Faisons plus d’exercice. Limitons les produits excitants et les produits dépresseurs. Changeons nos horaires de sommeil pour dormir mieux.
Si nous sommes souffrants, dans notre corps ou dans notre esprit, faisons ce qui est en notre pouvoir pour améliorer notre état ou nous en accommoder. Réservons nos moments de haute énergie à la créativité, et nos moments de basse énergie aux loisirs. Créons-nous des routines, pour que ce que nous voulons vraiment faire soit fait, pour consacrer le maximum de temps à des activités créatives.
Cela implique de faire le tri dans notre vie. Nous n’avons que 24 heures dans une journée, nous n’avons qu’un budget fini, nous n’avons qu’un espace restreint, et demain nous ne serons peut-être plus là. Alors il est temps de passer le rasoir d’Ockham. Faisons le tri dans notre programme de la journée, dans nos engagements, dans nos relations, dans nos dépenses, dans nos possessions matérielles. Gardons ce qui nous confère de la joie, ce qui correspond à nos valeurs. Et séparons-nous du reste, quand le temps est venu, avec gratitude pour les bons moments passés ensemble, sans regrets.
Quand ce tri est fait, notre vie devient simple, fluide. Nous disposons enfin de l’espace nécessaire à notre créativité et notre épanouissement. Nous avons fait de la place pour grandir. Au sujet du rangement et du tri, une référence : La Magie du rangement, par Marie Kondo. Le livre ne dit pas quoi faire des objets une fois triés. A nous de voir si nous jetons, offrons, recyclons, échangeons, revendons…
Cultiver le tri, c’est cultiver notre liberté. Déclinons les partenariats qui écorchent notre liberté créative. Abandonnons nos anciens projets quand ils ne nous correspondent plus. Ne perdons pas de temps sur ce qu’un autre pourrait faire à notre place, concentrons-nous sur ce que nous seuls savons faire.
Quand ce tri est fait, nous pouvons enfin agencer les choses d’une façon plus pratique, plus rationnelle. Une fois les éléments de notre vie réduits à l’essentiel, les ranger est presque inutile, ils sont tous disponibles, proches, visibles, sans empiéter les uns sur les autres. Ce qui semble un trou noir de la créativité, la gestion quotidienne, n’est plus qu’une tête d’épingle, un réflexe qui prend quelques minutes et structure notre journée.
La simplicité crée l’ordre, et l’ordre crée la simplicité.
Traçons nos idées, nos projets, nos engagements. Notons tout. Constituons-nous un cahier de notes, un classeur excel, une application pour garder trace de nos choses à faire : tous nos projets regroupés dans un système fiable. Quittons le monde des « je ferais » pour le monde des « je ferai ».
Un jour, quand nous aurons limité les choses à l’essentiel, quand la créativité et notre vie ne sera plus qu’un flux, nous n’aurons plus besoin de noter, concevoir et faire seront partie d’un même moment. Le cerveau ne peut mémoriser qu’une dizaine de choses à faire à la fois, ne comptons pas arriver à ce stade tout de suite. Notons d’abord, trions ensuite. Abandonnons les tâches qui ne nous procurent plus aucune joie.
Ces listes constituent un terreau précieux. Elles font le tri dans notre mémoire, de l’espace disponible dans notre cerveau. Elles sont un réservoir d’idées et d’expériences à recycler. Elles sont un facteur de haute énergie.
Affûtons notre regard, faisons le tri, créons des routines et des listes. Soyons toujours prêts pour ne pas avoir à nous préparer. Quand les choses sont rendues à cet état de clarté, nous sommes comme un pompier : prêts à intervenir en quelques secondes.
L’idée qu’on se fait d’un travail est toujours plus dure que le travail en réalité. Répétons-nous cela comme un mantra. Achever une œuvre, c’est difficile. Se consacrer un temps fixe dans la journée pour avancer sur cette œuvre, c’est facile. Il suffit de mettre un pied devant l’autre.
Si l’idée de nous créer un emploi du temps rigide nous effraie, posons-nous plutôt cette question : Ici et maintenant, qu’est-ce que nous pouvons faire de mieux ici et maintenant ?
Si l’ordre booste notre créativité, utilisons notre créativité pour mettre de l’ordre. Affûtons notre esprit au tri. Trouvons chaque jour une nouvelle micro-résolution. Le meilleur outil pour être plus créatif, c’est la créativité.
La créativité nécessite du temps, de l’argent, de l’énergie. Appliquons la même méthode de tri pour augmenter les trois, ou pour se passer des trois.
Nous pouvons aussi créer en temps réduit, nous pouvons créer sans argent, nous pouvons créer alors que nous sommes dans la souffrance. Il nous suffit de réaliser que nous avons envie. Cette envie a juste besoin de s’exprimer, elle n’a besoin de rien d’autre. Et cette envie va nous sauver.
Ne conditionnons pas notre bonheur à une situation, mais agissons pour provoquer des situations heureuses. Agissons en conformité avec nos valeurs. C’est ça qui nous rend heureux.
Cultivons notre indépendance, notre autonomie. L’indépendance est la liberté de choisir ses contraintes. Elle nous motive à trouver plus d’ordre, à chercher des solutions nous-mêmes, y compris demander de l’aide, au lieu d’attendre que ça tombe du ciel. C’est cette indépendance qui nous permet ensuite de nous engager dans un collectif, cette fois-ci parce que nous l’aurons choisi, non parce que nous nous sommes sentis contraints.
Tout est lié : énergie, valeurs, régime, vocation, société, créativité, simplicité volontaire. Embrassons cette complexité, comme un défi à relever, qui fait entièrement partie de notre énergie créative. C’est le défi qui crée l’énergie.